Annoncé pour la première fois en 2010, le Décret Tertiaire n’est finalement paru qu’en mai 2017 pour être suspendu 2 mois plus tard. Il paraîtra finalement le 23 juillet 2019, et sera précisé par un arrêté du 10 avril 2020.
Ce décret est le parfait exemple de la complexité que nous rencontrons pour avancer sur nos questions écologiques. Petit retour sur un décret hors du commun.
Un décret qui a vécu 3 mandats présidentiels
L’histoire commence le 12 juillet 2010, le Président de la République Nicolas Sarkozy promulgue la loi Grenelle II, adoptée par l'Assemblée Nationale et le Sénat, qui vise la réduction de la consommation d’énergie, la prévention des émissions de gaz à effet de serre et la promotion des énergies renouvelables dans la conception et l’exploitation des bâtiments.
Pourquoi le secteur du bâtiment ? Il pèse pour 44% dans la consommation énergétique finale française, tout secteur confondu (transports, agriculture, sidérurgie, industrie) : 68,7 Mtep (Millions de Tonnes équivalent Pétrole) en 2012, sur 154,4 MTep d’énergie finale consommée, à climat normal (source MEDDE, CGDD, SOeS).
Les professionnels disposent de 8 ans à compter du 1er janvier 2012 pour réduire leurs consommations. Le Décret Tertiaire était né !
Mais voilà, il y a un (gros) caillou dans la chaussure : les bâtiments publics sont soumis à l’obligation de rénovation du parc. Problème : les caisses sont vides, et l’obligation risque de peser lourd sur les dépenses publiques. Le décret ne paraîtra pas.
L’histoire reprend le 17 août 2015.
Nous avons changé de gouvernement et l’administration Hollande par l’intermédiaire de notre ministre de l’écologie et du Développement Durable, Ségolène Royal, lance le projet de Loi de Transition Energétique qui vise un objectif de réduction des consommations énergétiques du parc tertiaire de 60% à horizon 2050. Un objectif intermédiaire doit être fixé toutes les décennies et publié au moins 5 ans avant son entrée en vigueur par … décret.
Le 9 mai 2017, 5 jours avant la fin du mandat de François Hollande, le premier décret tertiaire parait, instaurant l’obligation de réduire de 25% les consommations énergétiques d’ici 2020. Les associations professionnelles du commerce et de l’hôtellerie déposent un recours le 20 mai 2017 auprès du conseil d’Etat, expliquant que les objectifs sont impossibles à remplir et qu’ils entament fortement la rentabilité de leurs activités.
La suspension du décret tertiaire sera prononcée le 11 juillet 2017, 2 mois seulement après sa parution. Selon le conseil d’Etat, le décret ne peut imposer une obligation de réduction des consommations énergétiques des bâtiments d’ici 2020, puisque la loi accorde un délai de cinq ans entre la publication du décret d’application et son entrée en vigueur.
Le 29 juillet 2019, le Décret Tertiaire voit finalement le jour sous l’administration d’Emmanuel Macron visant à faire réduire de 40% les consommations des bâtiments tertiaires d’ici 2030, 50% d’ici 2040 et 60% d’ici 2050 en fonction d’une année de référence établit entre 2010 et 2020.
Les conditions d’applications sont précisées dans l’arrêté du 10 avril 2020 : il concerne tous les bâtiments ou locaux d’activité à usage tertiaire dont la surface d’exploitation est supérieure ou égale à 1 000 m2.
A partir du 30 septembre 2021, le descriptif de l’activité tertiaire exercée, la surface des bâtiments concernés, les consommations annuelles d’énergie par source énergétique, les indicateurs d’intensité d’usage et l’année de référence et les consommations de références de chaque bâtiment devront être saisis dans la plateforme OPERAT (Observatoire de la Performance Energétique de la Rénovation et des Actions du Tertiaire), plateforme de l’ADEME (l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie, établissement public sous la triple tutelle du ministère de l’Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et du ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie).
À lire également : Guide Décret Tertiaire : loi Elan
Comment pouvons-nous agir face au Décret Tertiaire ?
Je reprends l’exemple de la poule et l’œuf de notre précédent article : Devons-nous vraiment attendre une réglementation pour agir ?
Quelques chiffres sur les bâtiments tertiaires (chiffres Observatoire de l’Immobilier Durable 2019, observatoire indépendant)
Chaque mètre carré de bâtiment construit représente 1,5 tonne de CO2 émis sur son cycle de vie,
Pour atteindre les objectifs de 2030, les consommations énergétiques doivent diminuer de 3% par an,
La consommation énergétique sur l’ensemble des bâtiments de bureaux (parties communes et privatives) en Île-de-France représente près de 1 MT CO2 EQ/an (1 Million de Tonnes CO2 équivalent par an),
10 à 30% d’économie d’énergies sont réalisables par la sensibilisation des locataires aux bonnes pratiques et grâce à la mise en place d’une gouvernance environnementale et énergétique partagée entre preneur, bailleur et exploitant.
Deux méthodes permettent de réduire les consommations d’un bâtiment : améliorer les performances énergétiques du bâtiment, et accompagner les occupants de ce bâtiment à adapter leur comportement de manière plus éco-responsable.
C’est pourquoi eGreen travaille sur ce dernier volet de réduction des consommations par le biais du changement de comportement depuis plus de 8 ans, et obtient des résultats allant jusqu’à 20% d’économies en quelques semaines.
Sa plateforme permet également de suivre les données des consommations d’un bâtiment en temps réel (énergie, eau, déchets, qualité de l’air), et de faciliter pour ses clients la mise en œuvre des obligations relatives au décret tertiaire.
Concrètement, un accompagnement est proposé permettant d’automatiser la collecte des données de consommation, superviser les dépenses énergétiques, calculer les économies réalisées et déclarer les données auprès de la plateforme OPERAT de l’ADEME.
Vous pouvez demander nos références clients ici.
À lire également : Solution Décret Tertiaire
A propos de l’auteur :
Thibaut MARCILLIERE, ingénieur et conscient de l'urgence environnementale, est responsable du développement d'eGreen, société spécialisée dans la réduction de notre impact sur la planète au travers de l’analyse des données de consommation et des sciences du comportement.
Des histoires similaires
L’histoire de la Stratégie Nationale Bas Carbone, ou SNBC, est une histoire très similaire à celle du décret tertiaire.
Le 18 novembre 2015 parait le premier décret SNBC. Il avait fixé un budget carbone (quota d’émissions ou des émissions acceptables de CO2 par secteur). Il a été dépassé de 3,7% (soit 65 MT CO2 eq/an).
Le 20 janvier 2020, le ministère de la Transition écologique a mis en ligne la révision de la stratégie nationale bas carbone, ou SNBC. Elle fixe comme objectif la neutralité carbone en 2050, secteur par secteur. Le problème : cette stratégie reste toujours non contraignante.